All the Important Things That the Candidates Haven’t Discussed

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A un jour de l’élection présidentielle américaine, le politologue Daniel Warner met en balance les arguments démocrates et républicains. Et rappelle que si la polarisation est forte, les deux visions politico-sociales ne sont pas si éloignées d’un camp à l’autre

Les élections à venir aux Etats-Unis attirent particulièrement l’attention sur le choix du président et du vice-président, bien que tous les membres de la Chambre des représentants et un tiers du Sénat soient également élus à cette occasion.

Le monde entier attend le vote de demain avec attention, car les résultats auront en effet des répercussions sur le monde entier. Les Etats-Unis et/ou Israël attaqueront-ils l’Iran? Y aura-t-il une guerre commerciale avec la Chine? Les Etats-Unis pourront-ils atteindre leurs obligations financières tout en réduisant leur dette et en créant des emplois?

Quels sont les arguments des deux parties? Les démocrates, les yeux rivés sur l’interventionnisme de Franklin Roosevelt lors de la Grande Dépression, comptent sur le gouvernement pour agir en tant que filet de sécurité, alors que les républicains chantent les louanges de l’initiative individuelle et de l’autorégulation du marché. Pour les démocrates, Mitt Romney incarne le 1% méprisant envers les 47% de la population prétendument dépendants du gouvernement. Les démocrates croient que Barack Obama est en accord avec le futur et que les républicains s’embourbent dans leur nostalgie du passé.

Pour les républicains, Barack Obama s’est révélé être une grande déception; économiquement, le peuple américain se trouve dans une situation pire aujourd’hui qu’en 2008. Mitt Romney affiche quant à lui un parcours de dirigeant impressionnant. Il est incontestablement sorti gagnant, selon la plupart des sondages, du premier débat et a également remporté le test de l’attitude présidentielle. S’appuyant sur l’échec d’Obama à créer des emplois, une dette en augmentation, le déclin du prestige des Etats-Unis, et enfin les tueries récentes des quatre diplomates américains en Libye, les républicains prétendent avoir la preuve de la faiblesse globale des Etats-Unis sous une administration démocrate.

Des vérités sont présentes dans les deux points de vue. Mais en réalité, il n’existe pas de différence excessive entre les candidats, malgré ce que proclament les deux campagnes. Presque toutes les élections aux Etats-Unis tournent autour du centre droit, ainsi que les candidats libéraux comme George McGovern ou l’extrême conservateur Barry Goldwater ont pu le constater. Les Américains sont opposés aux représentants radicaux, qu’ils soient de gauche ou de droite.

Mais les Etats-Unis font désormais face à deux changements radicaux. La position de domination politique et économique des Etats-Unis durant la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale n’existe plus. Ce n’est pas que les Etats-Unis soient sur le déclin, position – ainsi que Paul Kennedy l’affirme – que tous les empires doivent inéluctablement expérimenter une fois ou l’autre, mais plutôt que le monde est devenu multipolaire au lieu d’unipolaire ou de bipolaire. La domination d’une puissance n’est plus possible.

Le deuxième changement radical se trouve dans les moyens de production. Nous évoluons d’une époque industrielle vers des économies de services plus avancées. Ces changements nous offrent d’énormes potentiels – pour exemple une jeune start-up qui se vend un milliard de dollars après un an. Mais avec ces progrès technologiques, l’inégalité progresse également entre les nantis et ceux qui n’ont rien, le 1% et le 99%. Les deux candidats à la présidence essaient de toucher une classe moyenne en voie de disparition, qui se retrouve coincée entre les coûts en augmentation et des emplois dépassés.

Les deux changements majeurs que devra affronter le futur président sont ainsi le rôle changeant des Etats-Unis et la nature changeante des moyens de production. Le problème pour ces deux candidats est de convaincre l’électorat que la situation est critique – l’économie était au bord du précipice en 2008 – et qu’un changement radical dans la politique ¬traditionnelle est nécessaire, toutefois en se gardant d’apparaître radical.

Malheureusement, mais logiquement, aucun candidat n’est disposé à prendre le risque d’affronter l’image traditionnelle, exceptionnelle, des Américains. Aucun des candidats n’a été honnête face aux deux changements en train de se mettre en place. Pourquoi pas? Simplement car les électeurs ne veulent pas entendre parler de la réalité actuelle. La dissonance cognitive est un fort système de défense psychologique. Ainsi que le disait l’historien politique Allan Lichtman: «Je pense qu’il y a une tendance plus marquée aujourd’hui que dans le passé à éviter à tout prix de discuter des problèmes sérieux.»

J’ai voté, bien que sans conviction. De nombreux amis ne vont pas voter. Aucun candidat n’a honnêtement présenté les défis qui attendent les Etats-Unis et le monde. L’ancien directeur du programme politique au Département d’Etat des Etats-Unis déplorait, peu après le troisième débat, «qu’aucun candidat n’ait même articulé le mot «climat». Ni pauvreté, ni maladie, ni alimentation, ni eau, ni même énergie.»

Espérons que les deux jouaient leur jeu pour les électeurs. Espérons qu’ils savent, tous deux, ce qu’il en est. Bien que le futur président devienne le président des Etats-Unis, et non du monde, le dirigeant américain reste important. Au moment où la Suisse vante les avantages du multilatéralisme en célébrant le dixième anniversaire de son entrée à l’ONU, la présidentielle de 2012 est limitée et décevante. «Toute politique est locale», déclarait Tip O’Neill, mais il serait irresponsable pour le futur président de céder à ce provincialisme.

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