Edited by Kyrstie Lane
Un match électoral des plus serrés, un triomphe à l’arraché et pour conclure, un échange d’hommages et de congratulations entre les deux duellistes : qu’elle paraît belle et même glamourous, l’Amérique, quand au terme d’une féroce et hollywoodienne campagne qui a coûté des milliards de dollars aux généreux (et très intéressés) donateurs, elle donne à voir au monde une telle démonstration de courtoisie, de fair-play, de respect des règles démocratiques !
Fugace cependant risque de s’avérer cette séduisante image. Pour remarquable en effet que soit son exploit – un second mandat décroché de justesse en dépit d’un bilan en demi-teinte – Barack Obama, l’homme le plus puissant de l’univers, est loin d’être tout à fait maître chez lui. Face à un Congrès dont la bonne moitié lui est hostile, il aura sans doute bien du mal à tenir ses promesses électorales en matière de croissance, de lutte contre le chômage, de réduction de la dette publique et autres problèmes internes appelés à accaparer l’essentiel de son temps et de son énergie.
C’est au galop toutefois que les tensions internationales risquent de venir bousculer les préoccupations domestiques du chef de la superpuissance US, invariablement jalouse de son leadership mondial. En tête de ces brûlots figure le dossier du nucléaire iranien, véritable bombe à système d’horlogerie dont on peut déjà percevoir le tic-tac. Car si l’actuelle administration américaine s’emploie à modérer les ardeurs guerrières d’Israël, privilégiant au contraire l’action diplomatique et les sanctions économiques contre l’Iran, elle s’est formellement engagée à empêcher, coûte que coûte, la république des mollahs de se doter d’un atomique ; or, avertit plus d’un expert, ce pourrait être chose faite dès 2013 ou 2014 au plus tard.
Ce n’est pas là, cependant, le seul terrain où les implications de l’incontournable connexion israélienne viendront probablement peupler les cauchemars du président américain. C’est vrai que durant leur campagne, Barack Obama et son challenger républicain, courtisant tout à la fois les électorats juif et évangéliste, ont battu tous les records d’éloquence pour protester de leur indéfectible amitié pour Israël. À aucun moment d’ailleurs, on n’a entendu Barack Obama évoquer, même par la bande, les négociations de paix au Proche-Orient, bloquées en raison de la mauvaise foi et de l’intransigeance de Benjamin Netanyahu.
Par-delà les contraintes et nécessités électorales aux États-Unis, apparaît cependant le lourd contentieux opposant Barack Obama à un aussi remuant et arrogant allié. En s’obstinant à poursuivre imperturbablement – et même à intensifier la colonisation des terres palestiniennes occupées – le chef du gouvernement israélien a proprement discrédité en effet le président, faisant voler en éclats l’exaltante vision d’une paix judéo-arabe, mais aussi d’une harmonie retrouvée entre l’Occident et le monde musulman, que développait ce dernier dans son discours historique de 2009 au Caire. En étalant, deux ans plus tard, ses griefs sur la place publique de Washington avant de se faire ovationner debout par un Congrès décidément plus royaliste que le roi, c’est à l’amour-propre du monarque sans couronne qu’il portait atteinte cette fois.
Est-il excessif de croire que Barack Obama, en meilleure posture désormais pour rappeler à l’ordre le récalcitrant, ne compte pas s’en priver, comme s’en alarme déjà la presse israélienne ? Parce que toute élection présidentielle américaine concerne ou affecte, de près ou de loin, la planète tout entière, notre petit pays n’est naturellement pas épargné par les interrogations, tantôt confiantes et tantôt angoissées. Car il n’y va pas seulement pour nous des retombées locales d’une guerre contre l’Iran ou de l’implantation définitive sur notre territoire de centaines de milliers de réfugiés palestiniens, ces oubliés d’un processus de règlement lui-même fantomatique. Avec un brasier syrien menaçant chaque jour un peu plus de s’étendre hors des frontières, c’est la paix entre Arabes et Arabes, entre sunnites et chiites de la région, qui est en passe de revêtir la plus tragique, la plus impensable, la plus urgente aussi, des priorités.
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