Barack Obama a remporté une belle victoire. Pour en prendre la mesure, il faut aller en Europe. Presque tous les dirigeants en place au plus fort de la crise, en 2008, et qui se sont représentés devant les électeurs ont été battus. Il est, avec Angela Merkel, l’un des rares sortants réélus. Avec Bill Clinton, il est aussi le premier démocrate depuis 1945 à remporter un second mandat. Même si sa victoire du 6 novembre n’est pas aussi imposante que celle de 2008, elle reste nette et sans discussion.
Entre un Mitt Romney incapable de se définir et un Barack Obama sérieux, faute d’être flamboyant, les Américains n’ont pas hésité. Ils ont renouvelé leur confiance au premier président noir de l’histoire du pays.
Ils ont choisi l’homme du centre. Celui qui, sans oeillères idéologiques, a géré au mieux une situation économique des plus difficiles. Celui qui, avec pragmatisme, a conduit une politique étrangère prudente. Bref, M. Obama a bien mérité d’être ovationné, mardi soir, à Chicago, au rythme d’une chanson d’Aretha Franklin opportunément intitulée : Respect. Qu’il en profite. L’avenir est truffé d’ornières.
Les rendez-vous à l’étranger ne sont pas faciles, de la Syrie à l’Iran, par exemple. Et le front intérieur est ingrat. Le chômage reste élevé (près de 8 %, plus de 20 % chez les jeunes), la reprise est fragile. La configuration politique à Washington ne change pas : la Chambre des représentants reste dominée par les républicains ; les démocrates disposent d’une petite majorité au Sénat.
Cela ne va pas faciliter la tâche de M. Obama. Sa priorité numéro un est le budget – la réduction d’un déficit chronique et qui, cumulé, leste le pays d’une dette de plus de 100 % du produit intérieur brut. Il lui faut trouver d’urgence, d’ici au 31 décembre, un accord avec les républicains.
Si le 44e président ne franchit pas ce “mur budgétaire”, le couperet tombe : l’application automatique de coupes dans les dépenses de l’Etat fédéral et de hausses d’impôts de l’ordre de 600 milliards de dollars. Autant dire, dans ce cas, que la relance est compromise et tout ce qui va avec – emploi, confiance des marchés et des investisseurs, en somme le moral du pays, qui n’est déjà pas au plus haut. Peut-il compter sur les républicains pour trouver un “grand compromis” qui sorte l’Amérique de la folie de la dette ? La défaite de M. Romney devrait les y inciter. Elle est historique : avec un chômage aussi fort, le républicain disposait d’un boulevard pour entrer à la Maison Blanche.
M. Romney n’a marqué des points que lorsqu’il s’est recentré. L’homme que les électeurs ont rejeté, c’est celui qui collait aux extrémistes de droite du Tea Party. Ce qu’ils ont condamné, c’est cette dérive fondamentaliste d’un Parti républicain dont l’obstructionnisme à la Chambre n’avait qu’un seul but : empêcher M. Obama de gouverner. Ils ont échoué.
Le score de mardi doit les inciter à coopérer avec le président. Celui-ci doit nouer une relation de travail constructive avec le Congrès. Alors, les uns et les autres pourront écouter la grande Aretha.
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