La réforme de l’immigration divise les ultra-conservateurs
Le projet de réforme de l’immigration a créé de sérieuses dissensions au sein du parti républicain, partagé entre sa réticence à “amnistier” des sans-papiers qu’il désigne comme des délinquants, et la nécessité de s’adapter à une nouvelle réalité démographique pour assurer sa survie.
Au cœur du débat, un rapport publié par la Fondation Heritage, le tout-puissant laboratoire d’idées ultra-conservateur de Washington, selon lequel la régularisation progressive des onze millions de clandestins qui vivent aux Etats-Unis coûtera au contribuable américain 6,3 milliards de dollars (4,9 milliards d’euros), en termes de dépenses sociales et d’éducation, durant les cinquante prochaines années.
Vives objections
Les estimations ont été vivement contestées par une majorité de spécialistes. Des figures de proue de la droite, comme Grover Norquist, fondateur d’Américains pour la réforme fiscale (Americans for Tax Reform), ont soulevé de vives objections. Le groupe de réflexion “libertarien” Cato Institute a avancé que la régularisation des sans-papiers n’entraînera pas de nouvelles dépenses budgétaires mais bien au contraire apportera au produit intérieur brut américain de la prochaine décennie 1,5 milliard de dollars.
L’un des auteurs du rapport, Jason Richwine, a soulevé encore plus la controverse lorsque la presse a révélé que, dans une thèse de doctorat soutenue à Harvard, en 2009, il avait affirmé que le QI des immigrants hispaniques était en moyenne substantiellement inférieur à celui des Américains “blancs”, et que la situation allait rester ainsi pendant des générations, d’où les coûts sociaux de la régularisation. M. Richwine a depuis a été contraint à démissionner.
A ceci s’ajoute un clash générationnel au sein de la droite républicaine, car le débat oppose l’ex-sénateur de la Caroline du Sud, Jim DeMint, Tea Party de la première heure, qui a quitté son poste en décembre 2012 pour prendre les rênes de la Fondation Heritage, à son protégé, le sénateur de Floride Marco Rubio, l’un des coauteurs du projet de réforme.
“Si DeMint gagne, Rubio perd”
Jim DeMint, qui contribua à faire couler une réforme similaire présentée par George W. Bush en 2007, fut l’un des premiers à soutenir la candidature de Marco Rubio en 2010 car il voyait en lui un digne héritier de ses idées conservatrices. Aujourd’hui, les deux hommes sont devenus adversaires. “Si DeMint gagne, Rubio perd”, a déclaré au New York Times, Frank Sharry, de l’association pro-immigrants America’s Voice, ce qui pourrait “nuire aux ambitions républicaines de récupérer la Maison Blanche”.
Le projet de réforme est actuellement débattu au sein d’une commission du Sénat américain qui doit examiner plus de 300 amendements. Les discussions pourraient durer des semaines avant la deuxième étape, devant l’ensemble du Sénat, où les démocrates disposent d’une fragile majorité. La Chambre des représentants, contrôlée par les républicains, devra ensuite examiner la réforme avant l’adoption finale, au plus tôt cet été.
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