Obama, la Syrie et les armes chimiques : l’impossible résolution du conflit
Alors qu’on célébrait hier l’abolition de l’esclavage, ne pourrait-on pas, plutôt que de se fêter les gestes courageux du passé, s’occuper des petites et grandes lâchetés d’aujourd’hui ?
En 1942, Anne Frank, dans sa soupente, avait entendu parler de “chambres à gaz” et en 1941 Winston Churchill parlait de “crimes sans nom”, mais on ne pouvait imaginer une telle monstruosité. Depuis on a vu de quoi l’homme était capable.
La “ligne rouge” américaine
Chaque fois, au Rwanda, à Srebrenica, chez les Kurdes irakiens, on dit “plus jamais ça”, mais chaque fois on reproduit la même couardise. La même chose est en train de se reproduire sous nos yeux en Syrie où tout un peuple se fait massacrer. On ne peut pas dire qu’on ne savait pas puisque des journalistes témoignent depuis deux ans de cette tragédie qui a fait au moins 70.000 morts, plus d’un million de réfugiés et quatre millions de déplacés.
Depuis quelques mois courent des rumeurs d’utilisation de gaz chimiques par le régime. Déjà en décembre le magazine américain “Foreign Policy” se basait sur un câble diplomatique du consul général américain à Istanbul qui était jugé “convaincant” par l’administration Obama. Les chancelleries occidentales avaient alors averti que l’utilisation d’armes chimiques était la “ligne rouge” que le régime de Bachar al-Assad ne devrait pas franchir.
La Syrie, lâchée par l’international ?
Cette fois ce ne sont plus des rumeurs : des vidéos montrent des victimes suffoquant et vomissant. Vendredi l’envoyé spécial de “Libération” en Syrie rapportait de nouveau témoignages :
“Selon moi, cela ne fait aucun doute, il s’agit d’une attaque au gaz sarin. Les symptômes coïncident. Et plusieurs membres du personnel soignant ont également été contaminés alors qu’ils n’étaient pas sur le lieu de l’attaque. Cela n’arrive pas avec des armes conventionnelles”, affirme Hassan Kawa, directeur de l’hôpital d’Afrin, où ont été traitées les victimes.
Ce vendredi 10 mai, le Premier ministre turc Erdogan a estimé que la Syrie, en utilisant des armes chimiques, a “franchi depuis longtemps” la ligne rouge fixée par les États-Unis. Or, c’est le moment où les États-Unis et la Russie viennent proposer aux insurgés syriens comme au régime de négocier une solution politique à l’occasion d’une conférence internationale.
Alors que l’insurrection a très froidement réagi en rappelant que le départ de Bachar al-Assad était un préalable à toute négociation, cette annonce a évidemment réjoui Damas. La France qui avait pris des positions en pointe en reconnaissant l’opposition syrienne et s’était engagée à livrer des armes à celle-ci, a fait machine arrière en déclarant qu’il “ne pouvait pas y avoir de livraisons d’armes”. Les États-Unis en proposant avec Moscou une fausse solution viennent de donner le signal de l’abandon du peuple syrien.
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