Did the Shutdown Go Far Enough?

Edited by Laurence Bouvard

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Il était moins une. Le Congrès américain a relevé le plafond de la dette des Etats-Unis, mercredi 16 octobre. Républicains et démocrates sont finalement parvenus à un compromis après des semaines de bras de fer ayant mené à la fermeture partielle de l’administration fédérale, mettant au chômage technique plus de 800.000 fonctionnaires. Un texte, voté au Sénat puis à la Chambre des représentants, a été présenté à Barack Obama pour promulgation.

Washington évite ainsi d’entrer dans une zone de danger financier. Faute de recettes suffisantes, le gouvernement aurait en effet été contraint avant la fin du mois d’élargir le “shutdown” aux personnels militaires ou aux bénéficiaires de pensions d’invalidité, puis de faire défaut sur une partie de la dette des Etats-Unis, plongeant le monde entier dans la récession.

Bien qu’il ait obtenu cet accord sans revenir sur sa réforme de l’assurance santé, Barack Obama ne fanfaronne pas. Le président américain rappelle que les élus doivent désormais regagner la confiance des Américains. “Il faut que nous cessions de gouverner d’une crise à l’autre”, dit-il. Il faut aussi regagner la confiance du monde économique. Et cela s’annonce mal.

17,5 milliards de dollars envolés

Ce “shutdown” aura coûté cher. Même si les fonctionnaires qui reprennent le travail jeudi seront payés rétroactivement, les Etats-Unis ont d’ores et déjà perdu 0,6 point de croissance au dernier trimestre, selon l’agence Standard and Poor’s. Plus de 17,5 milliards d’euros de richesses n’auraient pas été produites durant ces 16 jours, en raison notamment de l’arrêt des entreprises dépendant de l’administration publique, de la baisse de la consommation des fonctionnaires, des denrées périssables restées trop longtemps bloquées dans les entrepôts des ports ou des billets non réglés par les touristes ayant trouvé porte close à l’entrée des parc nationaux.

Le “shutdown” aura même coûté beaucoup plus cher que ça. Car ce n’est pas le premier, mais le 18e depuis 1976. Rien que sous l’administration Obama, qui n’a jamais gouverné avec un budget global, c’est la troisième fois que le Congrès menace de mettre les Etats-Unis en défaut de paiement. A l’été 2011, le blocage républicain avait coûté aux Etats-Unis sa note triple A chez Standard and Poor’s et débouché sur un texte prévoyant des coupes budgétaires automatiques, notamment dans des secteurs chers aux républicains, comme l’armée, rendant inévitables de nouvelles discussions budgétaires.

Ainsi, même si les investisseurs n’ont pas vraiment tenu compte de la dégradation de la note de crédit américain, acceptant des taux d’intérêts toujours plus bas pour prêter leur argent en toute sécurité au Trésor, ils n’ont pas vraiment été rassurés par l’incapacité de Washington à signer un accord budgétaire global et durable. Selon une étude de la fondation Peter G. Peterson citée par le New York Times, depuis l’arrivée de Barack Obama au pouvoir, l’incertitude fiscale qui en a découlé a renchérit le coût des emprunts des entreprises de 0,38 point, coûté 0,3 point de croissance aux Etats-Unis chaque année, 900.000 emplois en 2013, et réduit la production nationale de 150 milliards de dollars. Et ce n’est pas fini.

L’indifférence de Wall Street

C’est même partie remise. Selon les termes du compromis signé mercredi, l’Etat fédéral n’est financé que jusqu’au 15 janvier 2014, et le Trésor n’est autorisé à emprunter que jusqu’au 7 février. Une commission bi-partisane réunissant des représentants et des sénateurs est chargée de parvenir à un compromis sur les grandes lignes du budget avant le 13 décembre. En face de la sénatrice démocrate Patty Murray, y siégera notamment le républicain Paul Ryan, qui a voté non au texte de mercredi, et qui risque de se faire le porte-parole de ses confrères n’ayant pas digéré l’absence de concession de la Maison blanche sur “l’obamacare” (à l’exception d’un renforcement des contrôles préalables sur les revenus des bénéficiaires de pensions). Dans trois mois, le gouvernement sera donc vraisemblablement de nouveau forcé au “shutdown”. Et dans quatre, les Etats-Unis atteindront de nouveau le plafond de la dette.

De quoi créer la panique des marchés ? Pas vraiment. Encore mercredi, les places financières mondiales sont restées sereines. Seuls les taux des bons du trésor à un mois sont passés d’environ 0% à 0,3% ces dernières semaines, et les taux à trois mois ont pris quelques dixièmes ces trois derniers jours. Personne à Wall Street n’avait pris au sérieux les alertes de Barack Obama. Les investisseurs étaient convaincus qu’un accord aurait lieu, même s’ils envisageaient un possible retard.

Peu avant l’annonce du compromis, certains économistes relativisaient même très fortement l’impact du prolongement de la crise politique au-delà du 17 octobre. D’une, parce qu’il restait en fait un peu de temps avant que le gouvernement ne soit totalement à sec. De deux, parce que cela aurait donné plus de chance à une réforme constitutionnelle, seule solution permettant de stabiliser une bonne fois pour toute le débat budgétaire américain. Cas presque unique au monde, le président des Etats-Unis doit obtenir du Congrès qu’il vote à la fois le budget, les crédits de dépenses, et le plafond de la dette. Une configuration conférant un pouvoir de blocage démesuré aux populistes, peu soucieux d’envoyer le pays dans le mur par idéologie.

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