Sans faire preuve de nationalisme exacerbé, un Français peut s’étonner de l’amende de 10 milliards de dollars dont le procureur général Holder menace BNP Paribas, pour cause de transactions en dollars avec des pays sous embargo américain. Certes, la filiale genevoise de la banque a un peu rusé avec la transparence. Mais, en prétendant imposer sa diplomatie nationale à toute forme d’usage de sa monnaie – qui est, elle, internationale -, il prend le risque d’agacer les opérateurs du monde entier.
La vindicte du procureur s’explique, paraît-il, par l’approche des élections américaines de mi-mandat (« midterms »), où l’on va accuser Obama d’indulgence envers la finance et où il importe de prouver le contraire… Mais cette explication est bien villageoise pour un si grand enjeu. Que les politiciens américains continuent l’exercice et ils finiront par disqualifier le statut de leur monnaie. Quant au montant de l’amende, il est de peu inférieur aux 13 milliards infligés naguère à JP Morgan, l’un des responsables majeurs de l’historique crise des « subprimes », qui a désorganisé le monde entier.
Dans le même temps et sur un autre front, celui du commerce international euro-américain, la grande négociation transatlantique annonce une autre insécurité juridique, sous le prétexte paradoxal de normaliser les échanges. Exception faite des droits de douane, dont le bas niveau minore l’enjeu, les deux autres points de négociation sont en effet gros de malentendus et de contentieux, manne des avocats.
C’est le cas des normes (sanitaires, sécuritaires, sociales, environnementales), niches à non-dits protectionnistes où l’Amérique excelle. Et l’idée pittoresque de soumettre les litiges entre Etats et sociétés à une instance arbitrale purement privée est une manière à peine voilée de mettre en question les souverainetés publiques (non américaines) face aux intérêts des sociétés (généralement américaines). Tout cela à grand renfort de cabinets d’avocats (américains), dont le parasitisme complétera celui de la finance.
Il faut décidément que les Américains soient bien agacés pour être devenus si agaçants.
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