Obama, le président mal aimé
Aucun de ces succès ne rejaillit pourtant sur Barack Obama qui est devenu l’un des présidents américains les plus impopulaires, à mi-chemin de son deuxième mandat.
Avec une cote d’approbation de 40%, il rivalise avec le taux d’impopularité de George W. Bush. Au point de constituer un véritable boulet pour les candidats démocrates aux élections de mi-mandat qui ont lieu aujourd’hui. Et qui risquent de faire basculer le Sénat entre les mains des républicains.
«Barack Obama est relégué au rôle de paria, résigné à être prisonnier d’un système qu’il n’a pas réussi à changer», constate durement le magazine Politico.
Le pays émerge de la crise qui l’a terrassé en 2008, et les experts attribuent cette éclaircie, au moins en partie, aux politiques du président. Pourquoi donc est-il si mal aimé?
D’abord, parce que les statistiques économiques ne disent pas tout et qu’une grande partie de la population ne ressent pas les effets de la reprise.
«Le niveau de vie de la classe moyenne n’a presque pas augmenté. Les gens se disent: j’ai peut-être trouvé un job, mais ma femme n’en a pas, et mon fils non plus», souligne John Parisella, ancien délégué du Québec à New York et expert en politique américaine.
Les nouveaux emplois ne sont pas toujours bien payés et les gens ne mesurent pas bien où ils en seraient sans la politique de relance d’Obama. À preuve, selon un récent sondage, près de trois électeurs sur quatre jugent que l’économie américaine va toujours mal.
Et ce n’est pas Barack Obama qui les convainc du contraire: le grand orateur de 2008 n’arrive pas à s’attribuer ses propres réalisations, qui se situent toujours en deçà des attentes qu’il avait créées.
Voilà peut-être un autre facteur expliquant la désaffection face à ce président qui avait électrisé les foules avec son «Yes we can» de 2008. Ses réussites sont partielles, frustrantes pour ceux qui auraient aimé le voir aller plus loin, et rejetées par ceux qui trouvent qu’il en a trop fait.
Aujourd’hui, Obama est assiégé de tous côtés, écrit l’économiste et chroniqueur Paul Krugman dans une longue plaidoirie en faveur du président mal aimé, publiée par le magazine Rolling Stone.
Selon lui, Obama se fait vilipender par une droite conservatrice déchaînée, mais aussi par la gauche, pour laquelle il n’est pas vraiment le progressiste qu’il a prétendu être. Tandis que les médias perpétuent l’image d’un président qui a tout raté, un constat qui est pourtant largement immérité, selon Krugman.
Dans la colonne des succès, ce dernier cite la réforme de l’assurance médicale – imparfaite, soit, mais qui a élargi de façon significative l’accès aux soins, et réduit les coûts du système de santé aux États-Unis. Une réforme sans précédent, et qui est là pour rester, selon lui.
Autres points en faveur d’Obama: il a amélioré les contrôles sur le monde de la finance, a atténué les inégalités en abolissant les congés fiscaux des plus riches, a contourné le blocage du Congrès pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ses politiques n’empêcheront pas une autre crise économique, mais le cas échéant, elles minimiseront son impact, écrit Paul Krugman.
Dans tous ces cas de figure, Obama aurait pu faire mieux, ce que retiennent ses critiques. Mais il aurait pu faire pire – ce que le grand public ne voit pas.
Bien sûr, il y a la promesse reniée de fermer Guantanamo. Bien sûr il y a le retrait précipité de l’Irak qui a ouvert la porte aux fanatiques du groupe État islamique.
Il y a cette image amochée, entachée par des erreurs colossales, comme aller jouer au golf le jour de la décapitation du journaliste James Foley. Il y a aussi cette impression de président fatigué, indécis face à des crises internationales sans précédent. Un président qui semble presque compter les jours qui le séparent de la fin de son mandat.
Tous ces facteurs jouent contre Barack Obama qui en paiera vraisemblablement le prix aujourd’hui. Mais pour Paul Krugman comme pour John Parisella, l’histoire pourrait bien jouer un tour aux détracteurs du premier président noir à avoir réussi à se faire élire à la Maison-Blanche.
Au point de garder en mémoire ses réalisations, tout imparfaites soient-elles, plutôt que ses échecs.
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