In the United States, Demographics Are Destiny; Trends Now Heavily Favor the Democratic Party

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« Aux Etats-Unis, la démographie, c’est la destinée. Or les tendances lourdes sont favorables au Parti démocrate »

Donald Trump est l’héritier d’une vieille tradition protectionniste et xénophobe, propre au Parti républicain et théorisée par le politologue d’Harvard Samuel Huntington, l’auteur d’un livre à succès sur le « choc des civilisations » et d’un autre ouvrage consacré à l’identité américaine (Qui sommes-nous ? Odile Jacob, 2004). Dans ce dernier livre, Huntington cherchait à démontrer que les Latinos étaient inassimilables à cause de leur culture, de leur langue et de leurs mœurs : ils menaçaient l’existence même d’un fantasmagorique « credo américain », dérivé de la tradition anglo-puritaine.

Dans la même lignée, mais de façon plus brutale encore, Trump n’hésite pas à dénoncer la « déviance » des immigrés mexicains, en les soupçonnant ouvertement d’être des « violeurs » et des « marchands de drogue ». Il propose donc l’expulsion de quelque 12 millions de sans-papiers, hispaniques pour la plupart, qui résident aux Etats-Unis depuis parfois des décennies. Et, pour sceller l’affaire, il revendique la construction d’un mur infranchissable entre les Etats-Unis et le Mexique, qui serait de surcroît entièrement financé par les victimes – les Mexicains eux-mêmes.

La démesure de ces engagements est évidente : les murs sont faits pour être traversés et une frontière réellement infranchissable serait trop coûteuse en matériel et en hommes pour être réalisée. Pour protéger un tel mur, d’après certaines estimations, il ne faudrait pas moins de 400 000 gardes-frontières !

Violence et démesure

Quant à la déportation effective de 12 millions de sans-papiers, elle est, elle aussi, pratiquement irréalisable : il faudrait développer un gigantesque appareil policier et judiciaire, des camps d’internement pour les récalcitrants ou les personnes en attente de déportation, qui transformeraient les Etats-Unis en un Etat totalitaire.

La violence et la démesure du discours xénophobe de Trump ­garantissent de façon quasi certaine la victoire électorale d’Hillary Clinton à l’élection de novembre, en supposant que l’un comme l’autre sont les candidats choisis par les conventions des partis républicain et démocrate.

Trump a oublié cette vérité élémentaire : aux Etats-Unis, la démographie, c’est la destinée. Or les tendances lourdes sont éminemment favorables au Parti démocrate, surtout si son adversaire, le Grand Old Party, continue à surfer la vague de la latinophobie, du racisme anti-Noirs et d’une ­misogynie amplement illustrés dans les médias américains. La chance d’Hillary Clinton, d’après les estimations du Pew Research Center, est qu’elle disposera, en 2016, de millions de nouveaux électeurs hispaniques : 4,4 millions pour être exact.

Parmi ceux-ci, 3,2 millions (soit 72 %) sont des ­citoyens nés aux Etats-Unis et qui ont atteint l’âge de 18 ans entre 2012 et 2016, auxquels il faut ajouter les quelque 1,2 million de nouveaux électeurs, récemment naturalisés. En bref, le vote hispanique, en 2016, pèsera autant que le vote afro-américain et il représentera 12 % du total des électeurs potentiels (contre 9 % en 2008).

Contre-mobilisation gagnante

On assistera donc, cet automne, à une double mobilisation électorale, sans précédent dans l’histoire des Etats-Unis. D’un côté, la mobilisation des « petits Blancs » et des ouvriers chômeurs ou appauvris par la crise économique de 2008, qui constituent l’essentiel de la clientèle électorale de Trump et sont séduits par son discours musclé et xénophobe. De l’autre, la contre-mobilisation des femmes, des jeunes les mieux éduqués et des ­ethniques, c’est-à-dire, principalement, des Noirs et des Hispaniques.

Cette contre-mobilisation sera très probablement gagnante, puisque l’élection se jouera cet automne, comme d’habitude, dans une dizaine d’Etats décisifs, les Battleground States, dont la Floride, le Colorado, le Nevada, le Nouveau-Mexique, où le vote hispanique sera essentiel, et ­quelques Etats du Sud comme la Géorgie, la ­Virginie, la Caroline du Nord, où le vote afro-américain sera crucial. Le seul danger pour Hillary Clinton est la faible participation électorale des jeunes électeurs latinos — les 18-29 ans.

Leur taux d’abstention est élevé : en 2012, 38 % d’entre eux seulement se déplaçaient pour voter (contre 62 % en moyenne pour l’ensemble des électeurs). Il y aura donc un double enjeu pour Hillary Clinton : convaincre les jeunes Latinos de voter pour elle et accélérer la campagne de naturalisation des ­adultes en âge de voter. Mais elle a de la chance, « son meilleur agent recruteur », d’après l’un des leaders du Democratic National Committee, est Donald Trump ! Par ailleurs, l’un des aspects les plus sordides de la campagne des primaires est le concours d’architecture proposé par une fondation américaine, la Third Mind Foundation, pour sélectionner et récompenser le meilleur projet de « mur » destiné à séparer les Etats-Unis du Mexique, comme si l’esthétique pouvait l’emporter sur le répressif dans l’Amérique rêvée par Trump et ses affidés.

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