Le complot contre l’Amérique
Comme Poutine n’a pas directement donné l’ordre d’empoisonner Navalny, Trump n’a pas armé le bras des miliciens d’extrême droite qui projetaient d’enlever la gouverneure du Michigan, de la « juger » et de déclencher une guerre civile. Il n’a pas armé leur bras mais, comme Poutine, il a créé une atmosphère qui les a autorisés à penser que c’était un objectif sinon raisonnable en tout cas légitime.
Le terrorisme intérieur aux États-Unis est une vieille affaire qui précède d’assez loin l’élection de Donald Trump. Mais quand un président en exercice incite à la rébellion contre les instances gouvernementales qui lui sont politiquement hostiles, quand, en plein confinement, il appelle en un tweet en lettres capitales à « LIBÉRER LE MICHIGAN ! », c’est qu’un cap a été franchi. Et quand ce même président discrédite ainsi qu’il le fait sans relâche le processus électoral, socle premier d’une démocratie, alors le rapport au monde s’inverse.
En fait, Donald Trump alimente ce complot contre l’Amérique qu’il prétend dénoncer et dont il est en réalité l’un des principaux instigateurs. Il fourrage dans les plaies de la société pour en exsuder les humeurs.
Mensonge et complotisme ne sont que deux des nombreuses mamelles du trumpisme, mais celles-ci nourrissent les pires pulsions d’une nation fracturée. Et alimentent une paranoïa collective qui tourne à l’hystérie chez certains citoyens, persuadés qu’une guerre civile est souhaitable et inévitable.
Cette certitude n’est plus seulement celle d’une Amérique marginale et folklorique dans laquelle quelques illuminés ne représentant qu’eux-mêmes défilent en armes, derrière un drapeau nazi ou confédéré. C’est autre chose, de plus profond. La remise en question du fondement sur lequel repose l’équilibre même de la nation. Il s’agit là d’une menace palpable et réelle. D’un danger immédiat.
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