The Racial Question is Catching UpWith Barack Obama

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En réagissant aux attaques du camp républicain, le sénateur démocrate a joué avec le risque de se poser en victime.

Un siècle et demi après l’abolition de l’esclavage, quarante-cinq ans après le célèbre discours «I have a dream» de Martin Luther King, l’Amérique n’a toujours pas réglé son problème noir. Lancinante, la question raciale revient aujourd’hui sur le devant de la scène, pour empoisonner la campagne électorale.

Mercredi dernier, dans le Missouri, Barack Obama, réagissant aux publicités négatives du camp républicain le comparant à Britney Spears et Paris Hilton, avait déclaré : «Comme Bush et McCain n’ont aucune solution à proposer pour résoudre les problèmes de l’Amérique, leur tactique va être de vous faire peur de moi. Vous savez, leur seul message est devenu : ce type n’est pas un vrai patriote ; il a un drôle de nom ; il ne ressemble pas à tous ces autres présidents qu’on voit sur nos billets de banque ; il représente un risque.»

Une fois n’est pas coutume, le candidat démocrate était allé un tout petit peu trop loin dans la victimisation. Aussitôt, Rick Davis, le directeur de campagne de John McCain a sauté sur l’occasion pour dénoncer l’usage par Obama de la «carte raciale» : «Ça sème la division dans le pays, c’est négatif, c’est honteux, c’est faux.» Les républicains, qui ont à leur actif la nomination successive de deux personnalités noires (Colin Powell et Condoleezza Rice) au poste de secrétaire d’État, ne sont plus complexés par la question raciale.

Sentant que le terrain était mouvant, l’état-major de campagne du candidat démocrate s’est efforcé de calmer le jeu, niant qu’Obama avait accusé McCain de fonder sa campagne sur la couleur de peau de son rival. «Le but de cette course à la présidence est de relever d’énormes défis : une économie en récession, une politique étrangère en lambeaux, une crise énergétique affectant tout le monde sauf les grandes compagnies pétrolières», a précisé Robert Gibbs, porte-parole de la campagne démocrate. «Barack Obama n’a jamais cru que McCain souhaitait utiliser la question raciale dans sa campagne, mais il pense que les républicains ont recours aux vieilles ficelles politiciennespour distraire l’attention du public des vrais sujets. Obama, lui, a l’intention de concentrer sa campagne exclusivement sur eux.» Fermez le ban.

Mais, contre son gré, le sénateur de l’Illinois a été rattrapé ce week-end par la question raciale. Un meeting qu’il tenait en Floride a été soudain interrompu par trois jeunes Noirs brandissant une banderole : «Obama, que fais-tu pour les Noirs en Amérique ?» À la fin de son discours, le candidat démocrate leur a donné la parole. Le thème des interrupteurs : la communauté noire serait la principale victime de l’agressivité des banques, récupérant systématiquement les habitations des emprunteurs insolvables.

Peu adepte de la discrimination positive

Habilement, le candidat démocrate a reconnu la réalité du problème issu de la crise du subprime et de l’irresponsabilité passée des organismes prêteurs, mais il ne s’est pas laissé entraîner sur la question raciale. «Ce que je propose, c’est de régler tous ensemble, Noirs, Blancs, hispaniques, les problèmes que nous avons en Amérique. OK ?»

De son expérience passée comme militant associatif dans les quartiers pauvres de Chicago, où il traita aussi la misère de familles ouvrières blanches frappées par le chômage, Obama a retenu que les problèmes sociaux en Amérique ne se résumaient pas à la question raciale. Il n’est pas un adepte à tous crins de la discrimination positive à l’université, fondée sur la couleur de peau. Il a récemment affirmé qu’il serait injuste que ses deux filles, «nées dans un milieu privilégié», en profitent, plutôt que «des enfants blancs pauvres».

Obama, ancien de Harvard (comme son père kenyan), ne s’est pas forgé dans une culture raciale revendicative. Sa couleur de peau n’a jamais été un problème pour lui. Mais, de manière subliminale et inavouée, elle le reste pour l’Amérique, sans qu’on sache encore comment cela affectera le vote des électeurs.

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