(Québec) Au-delà de l’aspect technico-juridique du refus suisse d’extrader Roman Polanski aux États-Unis, cette petite affaire restera dans nos mémoires comme celle ayant illustré un détestable et méprisable réflexe humain : l’effet de clan.
L’esprit clanique conduit souvent un groupe d’individus à protéger jusqu’au ridicule l’un des siens. C’est ce qui s’est passé ici, où une chorale d’intellectuels s’est portée à la défense du grand cinéaste dès son arrestation et sans connaître l’ensemble du dossier.
Par pur conformisme clanique, des «génies» du monde des arts ont perdu la boule à ce moment-là. C’est ce que l’on retiendra.
Comme si c’était l’oeuvre produite par Roman Polanski qui était visée, et non pas les agissements d’un homme qui, en 1977, a eu des relations sexuelles avec une mineure de 13 ans!
Oui, c’est précisément l’étude de l’ensemble des pièces du dossier qui a finalement convaincu les autorités helvétiques de le libérer, malgré les faits graves qu’il a commis et qu’il a lui-même reconnus. Mais les soutiens du réalisateur franco-polonais ne peuvent crier victoire pour autant. Et surtout pas convaincre qu’ils avaient vu juste sur le fond.
Car c’est en partie pour des raisons d’État que la ministre fédérale suisse, Eveline Widmer-Schlumpf, a refusé d’extrader le cinéaste.
Il avait été arrêté à son arrivée à Zurich le 26 septembre, sur mandat international américain, alors qu’il était invité… par la Suisse pour recevoir un prix. Celle-ci a tout naturellement considéré qu’elle avait un devoir de protection à son égard.
D’un point de vue technico-juridique, il est, à la limite, compréhensible que le doute qui subsistait sur la valeur à accorder à la quarantaine de jours que Polanski a déjà passée dans une aile psychiatrique d’une prison californienne ait incité Berne à dire non à Washington.
Ce qui demeurera incompréhensible, par contre, c’est le soutien inconditionnel et aveugle dont le réalisateur du Pianiste a bénéficié dès le départ. Ou plutôt, qui demeurera bien trop compréhensible… L’esprit de clan, propre au genre humain, a pris le dessus, ainsi que cette espèce d’immunité artistique à laquelle des enfants terribles du monde des arts pensent souvent avoir droit. Certains ont même prétendu que Polanski ne pouvait être arrêté puisqu’il se rendait au Festival du film de Zurich. Ce festival aurait dû faire office de sanctuaire, selon eux. Comme s’il pouvait s’agir d’une zone de non-droit!
Comme bien d’autres, le ministre français de la Culture, Frédéric Mitterrand, s’était tristement illustré en déplorant l’arrestation de Roman Polanski «pour une histoire ancienne».
Comme tous les clans, celui-ci s’est exprimé avec un esprit de clocher.
Leave a Reply
You must be logged in to post a comment.