The Danger of the ECB Mimicking the Fed

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Je lis partout des propos inquiétants de ministres, de hauts responsables de banques centrales européennes et d’investisseurs à propos du rôle que la BCE pourrait jouer pour couper court à l’envolée des rendements obligataires italiens.

Tous font référence au rôle de la Fed ou de la Banque d’Angleterre comme acheteur de dernier ressort de titres d’État. On dit: “la BCE n’a qu’à faire que comme la Fed et racheter des titres italiens en grande quantité. La Fed l’a fait pour les bons du Trésor. Elle a montré qu’elle était là et soutenait sans limite le marché du Trésor.”

Tout cela est totalement faux et franchement, assez délirant.

De quoi parle-t-on aujourd’hui dans le cas de la crise italienne (et espagnole) ? On parle de défendre “l’accès au marché”. C’est à dire de maintenir artificiellement en dessous d’un seuil (de l’ordre de 7%) les taux auxquels un pays surendetté peut emprunter sur les marchés des capitaux. La BCE serait censée acheter massivement et sans limite pré-annoncée des titres italiens pour faire baisser les rendements à un niveau qui rende refinancable la dette italienne.

Or jamais la Fed n’a eu à défendre l’accés au marché par le Trésor.

Jamais sa politique d’assouplissement quantitatif n’a eu pour objet de sauver l’Oncle Sam de l’incapacité de trouver preneur pour ses obligations. Ce jour viendra peut-être. Mais pour l’instant cela ne s’est pas produit.

Le “quantitative easing” pratiqué en 2009, puis 2010-2011, était limité dans le temps et dans ses montants. Son objectif était de manipuler la courbe des taux. Il s’agissait de faire baisser les rendements des obligations à long terme. Ces derniers étaient déjà très bas. On voulait les faire baisser encore plus.

Pourquoi ? parceque la crise immobiliaire est le point de départ de la crise financière aux États-Unis. La baisse des taux hypothécaires est jugée essentielle pour soutenir ce marché.

Dire que la Fed a pratiqué l’assouplissement quantitatif pour sauver le marché obligataire américain est totalement inexact.

La crise a au contraire fait baisser les rendements obligataires américains à des niveaux sans précédent. Le problème de l’Amérique depuis 2008 n’est pas du tout le même que le problème italien, espagnol ou grec. Il n’y a pas de perte de confiance dans le papier américain. Même la dégradation par S&P de la notation américaine n’a pas empêché la chute des rendements des T bonds.

La Fed aujourd’hui citée comme modèle pour pousser la BCE à faire tourner la planche à billets par ceux-là même qui en Europe en 2010 l’a trainaient dans la boue pour pratiquer le “quantitative easing”. C’est stupéfiant.

Conclusion:

1) On peut contester le bien fondé de l’assouplissement quantitatif de la Fed. On peut souligner le mauvais signal qu’il donne sur le risque de dilution du dollar et donc d’inflation. On peut aussi s’alarmer de l’effacement de la frontière entre politique monétaire et fiscale. Tout cela est légitime et important.

2) On n’a pas le droit de dire que la Fed a dû voler au secours d’une demande pour le papier américain qui se serait évanouie. Cela ne s’est pas encore produit.

3) Il s’est révélé jadis très dangeureux pour une banque centrale de défendre une parité de change (comme on le faisait dans les années 70 et 80) contre le marché. Le marché est beaucoup plus riche que la banque centrale. Aujourd’hui certains voudraient que la BCE défende les prix des obligations italiennes. Ce serait commettre la même erreur.

Pour ce il faudrait des interventions massives sur plusieurs trimestres. Je ne suis pas un expert de l’économie européenne, mais cela me semble irréaliste à moins d’accepter l’idée de gonfler le bilan de la BCE dans des proportions extrêmes. Car après l’Italie, il faudrait qu’elle fasse la même chose pour l’Espagne, la France etc…

Le marché est toujours plus riche que les banques centrales. De petites interventions pour éviter des dérappages, d’accord. Mais le retour de la crédibilité est le seul moyen de résoudre la crise de confiance. Pour cela il faut de la croissance (on n’en parle pas assez) et aussi de la discipline, c’est à dire un grand concensus politique durable sur une politique budgétaire saine et des réformes structurelles des marchés du travail. L’idée que des élections au coin de la rue vont venir tout remettre en question faire peur aux investisseurs.

Ne cherchons à faire par le biais de la monnaie, l’économie de politiques structurelles sérieuses.

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