In the United States, Only Insecure or Non-Traditional Employment Is Growing

<--

Aux Etats-Unis, seuls les emplois précaires ou atypiques croissent

Ils sont le plus souvent créés par les sociétés de sous-traitance, assortis de salaires baissés de 10 %

Alors que pendant la crise de 2007-2009, le chômage américain est monté jusqu’à 10 %, le marché du travail semble aujourd’hui se porter mieux avec un chômage à seulement 5 %. Pourtant, tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. D’abord, beaucoup de sans-emploi ne cherchent plus de travail et ne sont donc plus comptés comme chômeurs. Ensuite, la croissance du nombre d’emplois aux Etats-Unis entre 2005 et 2015 s’explique entièrement par l’essor du secteur précaire et atypique. C’est ce que démontre un tout nouveau document de travail écrit par deux des plus grands économistes américains, Larry Katz, de Harvard, et Alan Krueger de l’université de Princeton.

La croissance de l’emploi précaire et atypique s’est fortement accélérée dans les dix dernières années. Entre 2005 et 2015, la part de ces emplois est passée de 10 % à 16 % aux Etats-Unis, soit une augmentation de plus de 50 %. Qu’entend-on par emploi précaire ou atypique ? Il s’agit de travailleurs indépendants, de salariés sous astreinte, venant d’agences d’intérim ou de sociétés de sous-traitance.

On entend beaucoup parler d’entreprises comme Uber, qui fournissent

une plateforme aux travailleurs indépendants. Selon certains, Uber et les entreprises du même genre offrent une plus grande flexibilité aux salariés, alors que d’autres y voient une nouvelle forme de précarité. Malgré une forte croissance, ces emplois de type Uber représentent seulement 0,5 % de l’emploi aux Etats-Unis à la fin de 2015. Ainsi, leur montée en puissance n’explique qu’une toute petite partie de l’augmentation du travail précaire ou atypique aux Etats-Unis.

En fait, ce sont surtout les emplois dans le secteur de la sous-traitance qui ont fortement progressé, passant de 0,6 % en 2005 à 3,1 % en 2015. Qui travaille dans ces sociétés ? De manière surprenante, plus un travailleur est qualifié et plus il a de chances de se retrouver dans ce type d’emploi. Or, on sait très peu de chose sur ces travailleurs qualifiés : est-ce réellement un travail précaire, et donc indésirable, ou un choix assumé ?

En revanche, la recherche montre que le développement de la sous-traitance est néfaste pour les travailleurs peu qualifiés. En effet, on est moins bien payé quand on travaille pour une société de service que lorsqu’on est directement embauché par l’entreprise. Par exemple, Arindrajit Dube et Ethan Kaplan montrent que cette baisse de revenus s’illustre aussi bien dans le secteur de l’entretien et du nettoyage que

dans celui de la sécurité. Le manque à gagner peut être très important, allant jusqu’à 10 %. De plus, ces travailleurs ne disposent pas d’assurance maladie (qui est privée et optionnelle aux Etats-Unis).

Les entreprises qui ont le plus recours à la sous-traitance aux Etats-Unis sont aussi celles qui généralement payent le mieux leurs salariés. Une stratégie qui leur permet de se concentrer sur leur cœur de métier, tout en augmentant leurs profits.

Mais l’essor du service aux entreprises et de la précarité de l’emploi qui va avec ne concerne pas que les Etats-Unis. Plus près de chez nous, Deborah Goldschmidt et Johannes F. Schmieder montrent que ce phénomène se produit aussi en Allemagne. L’envolée de la sous-traitance semble être un phénomène commun aux pays développés. Et partout, en Allemagne comme aux Etats-Unis, les salariés peu qualifiés voient leurs revenus chuter de 10 %. Il y a donc des raisons de s’inquiéter

About this publication