Storming the Capitol: ‘No Democracy Is Protected from Such Outbursts’

Published in La Libre
(Belgium) on 7 January 2021
by Bosco d'Otreppe (link to originallink to original)
Translated from by Hal Swindall. Edited by Michelle Bisson.
Despite its safeguards, democracy may be in danger everywhere, notes the researcher Pierre-Étienne Vandamme.

It is the most basic democratic value, namely the peaceful transition of power, that is under attack in Washington, observes Pierre-Étienne Vandamme, head of research in political philosophy at the National Funds for Scientific Research, Free University of Brussels, in an interview.

What is the symbolism of the photos of protesters invading the Capitol building last Wednesday?

Even if the photos show "only" several thousand of Donald Trump's most fanatical supporters, they are still shocking, and all the more so since blood flowed inside the Capitol and someone was killed. This brings to mind the assertion by the Italian philosopher Norberto Bobbio that the principal function of democracy is the transition of one government to another without a bloodbath. Thus, the fact that force was needed to stop the protesters carries very strong symbolism, even though things appear to have calmed down.

Could we say that these protesters have blasphemed against democracy?

In a way yes, since the key to stability in a democracy, and its very foundation, is the peaceful transference of power. This has taken place for centuries in the United States, whatever the other defects of its democracy. The simple dignity with which the Obama administration yielded its place to Trump in 2016, despite the widespread opposition to Trump among elites, impressed me very much at the time. In contrast to such examples, what is happening now is that the stability of a democracy reflects the attitudes of politicians, not just the institutions. Attitudes like Barack Obama's preserve democracy, whereas Trump's threaten it, despite the continuity of democratic institutions.

So does Trump's attitude and refusal to accept the voters' verdict mean democracy is in real danger?

It may make it through in the short term, but in the long term, there may be a gradual erosion of loyalty to democratic institutions. Basically, a democracy depends on respect for its institutions. The actions of a leader like Trump inciting rebellion against the democratic process might be seen as contributing to such an erosion of support for democratic institutions among the general population.

Could it also happen here in Belgium?

Europe did not need to wait for Trump to witness a decline in democratic institutions. Just look at Poland and Hungary. Now the fact that one of the oldest democracies in the world, one that has never hesitated to spread democracy to other countries, is undergoing such an event is highly significant. Here in Belgium, we enjoy the safeguard of a proportionally representative system that cooperates according to reasoned consensus. Majority democracies, by contrast, are generally more divided and unstable because they have only two large parties. Nonetheless, no safeguard can completely protect democracies from such outbursts like the occupation of the Capitol, since the health of any democracy depends more on the attitudes of its citizens and politicians. Democracy can therefore become endangered when, as in the U.S. today, many people feel that the other party is the enemy that must be vanquished rather than fellow citizens with the right to hold different opinions.

What can Joe Biden do to restore democracy in America?

This will be a very complicated task. One of the greatest drawbacks to American democracy is that the country is practically ungovernable. However appealing on paper, its system of checks and balances is paralyzing in practice. This was evident in Obama's problems getting his health care legislation passed. It is therefore necessary to reform American democracy, but the way it is designed prevents such a thing. Given that, I am not really optimistic about it. Not to mention that many American citizens cannot vote owing to complicated registration procedures, and the power of those who can vote is limited by the influence of lobbies and rich donors who can lend weight to any cause they wish. American democracy was already in decline for a long time before this, but what with the attack on the peaceful transition of power now underway, Biden will have to govern a deeply weakened democratic state. This week's events are not the end of it, as demonstrated by the negative reactions of the majority of Americans to the storming of the Capitol, but they tore another hole in it.






Malgré les garde-fous, la démocratie peut-être mise en danger partout, note le chercheur Pierre-Étienne Vandamme.

C’est la valeur minimale de la démocratie – le côté pacificateur de l’alternance au pouvoir – qui a été attaquée à Washington, note Pierre-Étienne Vandamme, Chargé de recherche FNRS en philosophie politique (ULB). Entretien.

Quelle charge symbolique ont les images de ce mercredi soir qui présentent le Capitole, siège de la démocratie américaine, envahi de manifestants ?

"Même si ces images ne représentent “que” quelques milliers d’électeurs de Trump – les plus fanatiques – elles sont évidemment choquantes. Cela d’autant plus que le sang a coulé et qu’une personne a été tuée dans le Capitole. Cela me rappelle la formule du philosophe italien Norberto Bobbio qui soulignait que la valeur principale de la démocratie était de permettre de changer de gouvernants sans bain de sang. Le fait qu’il ait fallu abattre une personne pour mettre fin à cet assaut du Capitole est donc symboliquement très fort, même si les choses semblent se calmer."

Peut-on dire qu’on a assisté à un blasphème contre l’idée démocratique ?

"Dans un sens oui, car la clé pour la stabilité de la démocratie, ainsi que ce qui fonde une démocratie, c’est l’alternance pacifique du pouvoir. Aux États-Unis, malgré tous les défauts de cette démocratie, on connaissait depuis des siècles de telles alternances pacifiques. La dignité et la simplicité avec lesquelles l’administration Obama avait laissé sa place en 2016, et cela alors qu’il y avait un assez large consensus parmi les élites contre Trump, m’avaient d’ailleurs frappé. C’est devant de tels exemples, et devant ce qui arrive aujourd’hui, que l’on voit que la stabilité d’une démocratie tient beaucoup aux attitudes des politiciens, et pas seulement aux institutions. C’est l’attitude d’Obama et des siens qui préservaient la démocratie. Aujourd’hui, c’est l’attitude de Trump qui la menace alors que les institutions n’ont pas changé entre-temps."

Trump, son attitude et son refus d’admettre le verdict des urnes mettent donc gravement en danger la démocratie ?

"À court terme, je pense qu’elle va s’en sortir, mais à long terme cela peut participer à une forme d’érosion de l’allégeance aux institutions. Or, une démocratie repose sur un respect des institutions. Le fait qu’un leader comme Trump incite à ne pas accepter la défaite peut contribuer à une érosion du soutien à la démocratie au sein de la population."

Jusque chez nous ?

"L’Europe n’a pas attendu Trump pour connaître des phénomènes d’érosion de la démocratie. Pensons à la Pologne ou la Hongrie. Maintenant, le fait que l’une des plus vieilles démocraties du monde, qui n’a par ailleurs pas hésité à donner des leçons de démocratie, soit touchée par un tel phénomène est symboliquement très fort. En Belgique, nous bénéficions de garde-fous avec un système proportionnel qui oblige les partis à coopérer et qui engage une logique plus consensuelle. Or, les démocraties majoritaristes, divisées entre deux grands partis, sont en général plus instables et polarisées. Néanmoins, aucun garde-fou ne nous prémunit entièrement contre de tels débordements, car ce qui compte pour la santé d’une démocratie, en plus des institutions, c’est l’attitude des citoyens et des politiciens. La démocratie peut donc être mise en danger partout si ces attitudes évoluent, si par exemple nous en venons à considérer, comme beaucoup aux États-Unis, que les partisans d’un autre parti sont des ennemis à combattre plutôt que des adversaires qui ont le droit d’avoir un avis différent et de le faire valoir."

Comment Biden pourra-t-il s’y prendre pour revigorer la démocratie dans son pays ?

"Ce sera très compliqué. Un des grands défauts de la démocratie américaine est qu’elle est pratiquement ingouvernable. Le système de freins et de contre-pouvoirs, séduisant sur papier, est en fait très paralysant. On l’a vu avec Obama et sa difficulté à mettre en place sa réforme des soins de santé. Il faudrait donc réformer la démocratie américaine, mais la manière dont elle est conçue freine de telles réformes. Je ne suis donc pas très optimiste. Sans compter que beaucoup de citoyens américains n’ont pas accès aux listes électorales (tant les procédures sont complexes pour y être inscrit) et que le pouvoir des électeurs est lui-même très inégalitaire face à l’influence des lobbys et des grands donateurs qui peuvent financer les campagnes comme ils le souhaitent. On était donc déjà dans une démocratie défaillante depuis des années, mais si la valeur minimale qui subsistait – le côté pacificateur de l’alternance au pouvoir – est désormais attaquée, on se retrouve avec une démocratie très fragilisée. Les événements de cette semaine sont encore loin de faire chuter la démocratie américaine (les réactions de la majorité des électeurs et des élus montrent qu’elle est toujours debout), mais ils l’abîment encore davantage."
This post appeared on the front page as a direct link to the original article with the above link .

Hot this week

Germany: Trump’s Tariff Policy: ‘Dealmaker’ under Pressure

Japan: Will the Pressure on Harvard University Affect Overseas Students?

Mexico: From Star Wars to Golden Domes

Austria: Trump’s Peace Is Far Away

Topics

Russia: Trump Is Shielding America*

Germany: Peace Report 2025: No Common Ground with Trump

Australia: America’s Economic and Political Chaos Has Implications for Australia

Ireland: The Irish Times View on Turmoil in Los Angeles: Key Test of Trump’s Power

Germany: Friedrich Merz’s Visit to Trump Succeeded because It Didn’t Fail

Russia: This Can’t Go On Forever*

Related Articles

Russia: Trump Is Shielding America*

Australia: America’s Economic and Political Chaos Has Implications for Australia

Ireland: The Irish Times View on Turmoil in Los Angeles: Key Test of Trump’s Power

Germany: Friedrich Merz’s Visit to Trump Succeeded because It Didn’t Fail