Plan de relance : Joe Biden pris dans le piège… de Pierre Mauroy ?
Par Franck Dedieu
Publié le 07/05/2021 à 17:49
Le président américain distribue des chèques. Et il a bien raison. Mais avec ce pécule, ses concitoyens achètent massivement des produits étrangers. Tiens, tiens, on dirait le plan de relance Mauroy de 1981…
Avertissement. Toute ressemblance avec une personne ayant existé ne serait pas purement fortuite. La relance Biden rappelle étrangement celle de Pierre Mauroy, engagée entre le printemps 1981 et l’été 1982. Pas dans ses montants bien sûr, tant le plan américain accumule le nombre de zéros, mais dans sa destinée.
Mais encore ? Les chèques gracieusement signés par la Maison Blanche à l’ordre du consommateur américain pour le faire revenir dans les magasins (400 milliards de dollars au total) parviennent à faire redémarrer la machine économique. Mais ils produisent en même temps un phénomène quasi-invisible à l’œil nu mais à terme dangereux : un bond des importations.
ARROSER L’INDUSTRIE DES AUTRES
Pas besoin de connaître tous les secrets d’une balance commerciale pour entrevoir le problème : si, gratifiés du coup de pouce Biden, les citoyens glissent dans leur panier des produits « Made in ailleurs », l’argent balancé par le président arrose en partie l’industrie des autres. Sur le seul premier trimestre de 2021, les importations font un bond de 62 milliards de dollars. Dans le même temps, les exportations baissent de 21 milliards.
Les socialistes français vécurent ce scénario-là, quarante ans plus tôt. Les cotillons de la victoire à peine retombés, le Premier ministre Mauroy dope le pouvoir d’achat à coups d’augmentations du Smic et d’allocations diverses transformées en produits venus d’Asie.
La leçon de Mauroy-Biden : une politique de relance dans un monde ouvert aux quatre vents de la concurrence ne donne pas sa pleine mesure. À propos de l’économiste Keynes, grand inspirateur de ces politiques, les économistes parlent d’ailleurs de modèle « circuitiste », comprendre à l’intérieur d’un cadre plus ou moins fermé.
GARE AU « TOURNANT DE LA RIGUEUR » US
La réaction injustement moquée du jeune ministre du Budget français, Laurent Fabius, de « bloquer » à Poitiers les magnétoscopes japonais et de leur imposer une redevance parviendra à contenir la déferlante. Biden va-t-il bloquer les smartphones made in China à Nashville ou Dallas ? Certainement pas.
La Maison Blanche parle en dollars, monnaie mondiale de réserve, quand Matignon cherchait à économiser des devises pour faire face à la baisse du franc sur les marchés des changes. En revanche, si Biden veut repartir sur une base économique saine – faite, non de subventions, mais de productions « Made in USA » – il devra penser à réactiver une forme de protectionnisme, pour protéger l’industrie américaine de concurrents asiatiques pas très regardants avec les droits sociaux. Sous peine d’imposer au pays « son » tournant de la rigueur.
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